L’envolée des divertissements à bord

Les systèmes classiques de divertissement en vol sont aujourd’hui concurrencés par des solutions destinées aux outils nomades des voyageurs. ce qui ouvre la voie à toujours plus... de divertissements en vol.

La banalisation à l’extrême des outils nomades – smartphones, tablettes, ordinateurs portables – aura, et a déjà un impact certain sur l’offre de divertissement en vol proposée par les compagnies aériennes. Dans son étude annuelle sur les habitudes high-tech des passagers, SITA, spécialiste des technologies dans le secteur aérien, montrait qu’en 2016, près de la moitié des voyageurs interrogés (46 %) ont d’ores et déjà regardé leur film en vol sur leur tablette ou ordinateur, soit plus encore que ceux ayant utilisé l’écran du siège (44 %).

Ce phénomène baptisé BYOD – “Bring Your Own Device”, “emportez votre propre appareil” – s’ajoute à l’apparition du WiFi à bord des avions. La connectivité en vol, qui se développe à vitesse grand V, ouvre la voie à une nouvelle offre de divertissement, directement dédiée aux tablettes et smartphones. Ainsi, mi-2016, Jet Airways fut parmi les premières à proposer un programme de streaming baptisé JetScreen, offrant 220 heures de contenus audio et vidéo afin de séduire les passagers “qui préfèrent avoir accès à du contenu sur les appareils mobiles”, explique Michel Simiaut, directeur général pour la France et l’Europe du Sud de la compagnie indienne.

Écrans fixes ou nomades

C’est un fait, les passagers voyagent avec leurs écrans nomades. Du coup, cela amène certaines compagnies à s’interroger sur la pertinence de conserver des écrans à l’arrière de leurs sièges. Parmi celles à avoir répondu par la négative, XL Airways a récemment dévoilé son système de divertissement XL Cloud, développé par la start-up espagnole Immfly et proposé directement sur les outils nomades des passagers. “Contrairement aux compagnies qui installent des écrans individuels, nous ne sommes pas limités par la technologie disponible à un ’instant t’. Nous bénéficions en temps réel de l’innovation des constructeurs d’appareils électroniques et pourrons ainsi proposer une expérience actualisée en permanence”, remarque Vincent Tomasoni, responsable marketing produit de la compagnie.

XL Airways propose à ses voyageurs des lunettes 2D et 3D pour des séances de cinéma immersives, pour un coût de location de 15 euros.
XL Airways propose à ses voyageurs des lunettes 2D et 3D pour des séances de cinéma immersives, pour un coût de location de 15 euros.

Après avoir téléchargé l’application – qui permet aussi de suivre la progression du vol et de chatter avec les autres passagers –, les voyageurs ont accès à tout un contenu de films, séries TV, jeux, presse et guides de voyage, certains gratuits et d’autres payants, l’offre Premium étant proposée à 9,95 € par vol. Les rares voyageurs ne disposant pas d’un appareil électronique peuvent louer un iPad Mini pour 15 €, accès au catalogue Premium inclus.

Pouvoir s’affranchir d’un investissement onéreux – un système In Flight Entertainment (IFE) s’élève à trois millions de dollars pour un Boieng B767 selon le Wall Street Journal, sans compter la surconsommation engendrée par son poids – tout en offrant à ses clients les moyens de se détendre pendant leur vol intéresse au premier chef les compagnies low cost. Ainsi, depuis le début de l’année, Air Asia X propose sur ses vols long-courriers le service Xcite Inflight Entertainment, mêlant blockbusters hollywoodiens et films asiatiques à regarder sur des tablettes Huawei Full HD de 10,1 pouces, mises gratuitement à la disposition des passagers Premium et contre une quinzaine d’euros pour les autres.

Quelques compagnies de taille moyenne ont également adopté cette politique du divertissement “light” sur tout ou partie de leurs lignes. Aussi bien Air Astana que Bangkok Air, El Al, Hawaian Airlines, OpenSkies et Pakistan Airlines ont notamment adopté le système WoW développé par Bluebox Avionics qui “offre un système de divertissement sur des lignes et à bord d’appareils où les systèmes traditionnels ont un coût prohibitif”, explique David Brown, directeur du développement de Bluebox.

Faut-il voir dans ces évolutions le début de la fin des IFE intégrés, comme certains le prédisent, partant du constat qu’American Airlines avait décidé de ne pas en installer sur ses futurs Boeing B737 MAX ? Probablement pas, car l’offre de divertissement à bord joue beaucoup sur la perception de qualité d’un transporteur. Dès lors, les grandes compagnies semblent se diriger plutôt vers des stratégies hybrides. D’un côté, les vols long-courriers, lignes les plus prestigieuses où les passagers apprécient de pouvoir passer le temps devant un must see du box office, conserveront une offre classique sur des écrans toujours plus larges avec un contenu plus riche et, de l’autre, les moyen-courriers, voire les court-courriers proposeront une solution de divertissement accessible sur tablettes et smartphones. Ce qui ne peut que réjouir les voyageurs puisque, sur ces vols, la vidéo était bien souvent inexistante.

C’est ainsi qu’Air France a commencé à tester en mars 2016 le produit AF Press Video depuis Paris CDG vers Tel-Aviv, Erevan et Amman. Une plate-forme de téléchargement de films et vidéos développée par la start-up Interactive Mobility est venue se greffer à l’application de presse digitale AF Press. Ainsi, de la même manière que les passagers pouvaient télécharger magazines et journaux à partir de 30h avant le départ, ceux-ci peuvent désormais sélectionner des films et séries dans un catalogue de 70 vidéos. En février dernier, 27 lignes vers l’Europe de l’Est et le pourtour méditerranéen disposaient de cette nouvelle offre.

Comme dans son canapé

Cette volonté d’offrir à tous les passagers les moyens de se divertir se remarque aussi outre-Atlantique. Tour à tour, les compagnies américaines ont annoncé en 2016 la mise en place d’une offre gratuite sur l’ensemble de leurs lignes domestiques. Mais là aussi, la différence existe entre courtes dessertes et longues liaisons. Si Delta Air Lines se targue de proposer son programme Delta Studio sur plus de 1000 appareils, seuls 400 de ces avions disposent d’un écran au dos des fauteuils.

Exception qui confirme la règle, JetBlue se vante d’être la première à intégrer un IFE à l’arrière de chacun de ses sièges. Fondé sur une plateforme Android, le système STV + de Thales mis en place par JetBlue offre jusqu’à 100 chaînes de télévision en direct, 300 films à la demande et, bien sûr, le WiFi gratuit. “Nous sommes en 2017 et nos clients s’attendent à pouvoir se connecter d’où qu’ils soient, installés dans leur canapé comme à 10 000 mètres d’altitude”, souligne Jamie Perry, vice-président marketing de la compagnie américaine.

L’arrivée dans les flottes des compagnies des Boeing B787 et Airbus A350 se conjuguant à l’apparition d’une nouvelle génération de systèmes connectés chez les leaders du secteur – le Japonais Panasonic Avionics et les Français Thales et Zodiac – , le divertissement à bord prend un virage résolument high-tech. Les IFE embarqués dans les A350 de Lufthansa jouent sur les nombreuses interactions possibles entre les écrans installés au dos des sièges et les outils nomades des voyageurs. À partir de l’application ’Lufthansa Companion’, le voyageur peut par exemple commencer à sélectionner sur son smartphone ou sa tablette les programmes qu’il veut regarder lors de son vol, et ce jusqu’à six semaines avant le départ.

Une fois composée, cette playlist sera synchronisée avec l’écran en arrivant à bord. De même, les centaines de films et programmes de télévision peuvent être visionnés aussi bien sur l’écran du siège que sur celui de la tablette. Mais ce dernier peut aussi servir de deuxième écran pour suivre le déroulement du vol, regarder un match de sport ou surfer sur internet.

Ces interactions ouvrent des opportunités de ventes additionnelles pour les compagnies. Et si, par exemple, pendant qu’il regarde un James Bond sur l’écran, le voyageur se voyait proposer sur son smartphone la commande d’un Dry Martini ? Certes, on n’en est pas encore là, mais déjà l’offre de shopping en vol, souvent bien triste, s’est largement développée. Le système Nordic Sky lancé par Finnair avec l’arrivée dans sa flotte des Airbus A 350 intègre un portail WiFi proposant une sélection de plus de 400 produits emblématiques du design nordique comme les vêtements Makia et Ivana Helsinki ou les chaussures Minna Parikka.

Grâce à la connectivité en vol, c’est surtout l’organisation des déplacements qui pourrait être améliorée. Concepteur des cartes Flight Path intégrées aux IFE, Beria Interactive réfléchit par exemple à enrichir son offre avec l’état du trafic en temps réel, permettant au voyageur d’affaires d’estimer de façon précise l’heure d’arrivée au lieu de rendez-vous et de réserver un taxi en conséquence.

 

Le confort du quotidien

Ne pas priver ses clients de leurs habitudes du quotidien : sur ses lignes domestiques équipées du WiFi, la compagnie australienne Qantas a conclu récemment un partenariat avec Netflix, Spotify et Foxtel pour permettre à ses passagers de retrouver leurs séries, musiques ou sports préférés.
De la même manière, plusieurs compagnies américaines comme American Airlines ou Delta offrent à leurs voyageurs la possibilité de se connecter à Netflix ou Amazon Prime. Avec les systèmes de divertissement de dernière génération, c’est aussi la télévision en direct en plein ciel qui est en train d’exploser. Ce dont les drogués à l’info en continu et, surtout, les passionnés de sport seront les premiers à se réjouir. Les chaînes Sport 24 et Sport 24 Extra sont aujourd’hui présentes sur 400 appareils de 13 compagnies, avec comme point fort celui de détenir les droits sportifs de nombreuses compétitions internationales. Ce qui, selon Panasonic Avionics, évite “aux fans qui essaient de se connecter aux retransmissions lors d’un voyage d’affaires, d’être déçus, soit parce que le WiFi ne supporte pas la vidéo en streaming, soit parce que les droits d’accès sont bloqués.